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Les annexes
Les annexes
Huile sur toile 33 x 41 cm

Tous les étés, je retrouvais mon vieux vélo hollandais couleur outremer.
Je pédalais en regardant le paysage, le nez au vent, sans passer de vitesses car il n'y en avait pas, 
 assise très droite, les mains appuyées sur le haut guidon.
Chez le marchand de la Trinité sur mer, mes parents avaient acheté d'occasion à très bon prix, cinq ou six bicyclettes
qu'ils stockaient dans une remise et qui étaient à disposition de tous les cousins et amis
qui venaient passer quelques jours de vacances.

On faisait tout à vélo : les trajets pour la plage, les courses au marché...
Dès qu'ils étaient en âge de s'asseoir, Bernard et moi installions les enfants

dans des sièges moulés en plastique orange, en vogue à l'époque, fixés sur les porte-bagages de nos engins. 

Les bambins grandirent et eurent bientôt leurs propres vélos et plus d'autonomie.
Je remplaçai alors le siège pour bébé  par une cagette à tout faire
dans laquelle j'avais déposé le matériel de base pour peindre.

Je m'accordais de temps à autre quelques moments de solitude pour aller dans la campagne
ou le plus souvent au bord de l'eau, au gré de mon inspiration.
Etant donné mon organisation rustique, il ne m'était possible d'emporter que des toiles de dimension modeste,
seules à pouvoir tenir en travers de la cagette. Durant la balade,
je les préservais des soubresauts en les fixant sommairement avec un sandow.

J'aimais pour pouvoir peindre tranquillement, les coins un peu à l'écart, un joli point de vue,
un carré d'herbe rase au milieu de la dune ou bien une petite crique pleine d'algues et sans trop de monde.
Pendant que les enfants étaient à l'école de voile, je profitais de deux ou trois heures pour poser des couleurs...
Pas loin de chez nous, dans la baie, il y a toujours des bateaux ancrés : de modestes voiliers et quelques barques de pêcheurs.
Les propriétaires accèdent à leurs embarcations en utilisant des annexes
qu'ils couchent au retour de leurs sorties en mer,
le long des berges facilement atteignables,
au delà des rochers découverts à marée basse, sur le sable et contre le talus herbeux. 

Je suis arrivée par le sentier côtier. J'ai posé mon vélo contre un pin maritime et ai transporté la cagette sur la grève.
C'était jour de grande marée. Quelques pêcheurs à pied se courbaient en deux pour trouver des palourdes ou des couteaux.
Je m'asseyai sur un rocher. Les couleurs vives des annexes avachies les unes à côté des autres avaient attiré mon regard
ainsi que les troncs élancés des pins qui les surplombaient et qui m'évoquaient des tableaux entrevus au Musée de Pont-Aven,
des paysages peints par Maurice Denis ou Sérusier... 
Dans cette atmosphère matinale et paisible, j'esquissai une petite oeuvre sans prétention, certes assez différente
  de celles plus mystérieuses, voire mystiques des peintres que j'admirais.

La pluie succédait au beau temps. Je terminai l'huile à l'abri dans la maison de mes parents.
Comme elle leur plaisait bien, la petite toile lumineuse demeura sur place
et elle est accrochée depuis sur un mur de la salle à manger,

au milieu de quelques-autres exécutées souvent rapidement durant les congés d'été
ou acquises au hasard des brocantes : scènes de plages,
marines, maisons bretonnes.
Elles restituent des lieux familiers, des moments heureux, petites pièces de puzzles des saisons passées...

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